Le début de l’année 2025 a été marqué par le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche et son intention d’imposer des tarifs douaniers de 25 %. Ce qui n’était encore considéré qu’un « bluff » à l’époque rajoutait encore du poids au « double préjudice » vécu par les producteurs forestiers, qui font encore les frais et d’une concurrence déloyale de la forêt publique, et du conflit du bois d’œuvre. Sans compter l’environnement réglementaire qui amenuise sans cesse notre capacité de récolter.
Le producteur forestier a droit à une rémunération juste et il a plus que jamais besoin de l’appui du gouvernement. Les interventions de l’État dans l’économie devraient avoir pour rôle de faciliter les entreprises locales et individuelles, et non de les concurrencer.
Tout investissement des producteurs forestiers dans l’exploitation de leur ressource nécessite une « prévisibilité » quant au prix reçu et aux volumes commandés. Ainsi, dans le contexte des changements climatiques, les feux de forêt ou les catastrophes naturelles deviennent « prévisibles »; nul besoin pour le ministère d’inonder le marché de bois de forêt publique brûlé, endommagé par la tordeuse ou renversé par le vent sans respecter les parts de marché des producteurs.
Il est déplorable qu’en 2025 nous devions encore rappeler le principe de « résidualité », qui oblige les industriels à s’approvisionner en forêt privée avant d’utiliser le bois des forêts publiques. Peut-être est-il temps pour nous d’exiger des compensations?
Pour l’heure, il y a, en plus des enjeux d’offre de bois, un urgent besoin de régler les problèmes de demande. Il est plus que temps que le fédéral règle de manière durable le vieux conflit sur le bois d’œuvre. À tout le moins, il est temps de dédouaner de leur responsabilité les producteurs de bois en les excluant à tout jamais de cette guerre commerciale dont ils sont les victimes collatérales.
Trop souvent, dans la sphère publique, les droits et la réputation du producteur sont bafoués. Mon collègue André Roy, président du Syndicat des producteurs forestiers du Sud du Québec, a eu la formule heureuse pour dénoncer une atteinte à la réputation qui dure au moins depuis les 25 ans de L’Erreur boréale. « Les producteurs de bois ne sont pas des vandales », claironnait-il dans le conflit l’opposant à la réglementation sur l’abattage d’arbres de la MRC des Sources. Des défricheurs, encouragés par feu le ministère de la Colonisation, aux producteurs forestiers, éléments essentiels à la vitalité des municipalités rurales, les exemples d’abus sont historiquement rares. Les producteurs forestiers ne tirent aucun avantage à détruire leur terre. L’erreur boréale, c’est sur les terres publiques qu’elle s’est produite.
Dédouaner quelqu’un, au sens figuré, c’est le relever du discrédit dans lequel il était tombé. De l’aider à se relever – surtout lorsqu’on a contribué à le faire trébucher –, c’est un peu la demande que nous faisons à la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, dans le cadre de la réforme du régime forestier.
Gaétan Boudreault
Producteur et président de la Fédération des producteurs forestiers du Québec
Éditorial paru dans la revue Forêts de chez nous, édition de février 2025.