S’initier aux crédits de carbone forestier

La forêt est une alliée naturelle dans la lutte contre les changements climatiques en raison de la capacité des arbres à séquestrer le carbone. Le secteur forestier peut aussi contribuer par la mise en place de stratégies d’aménagement forestier visant à augmenter les stocks de carbone sur un territoire ou en assurant sa séquestration à long terme dans des produits forestiers.

Les entreprises sont encouragées à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) en adoptant de meilleures pratiques, à défaut de quoi elles peuvent compenser leurs émissions en procédant à l’achat de crédits compensatoires sur le marché du carbone. La financiarisation de la lutte contre les changements climatiques peut intéresser les propriétaires forestiers puisqu’il s’agit d’une avenue permettant de financer des investissements en sylviculture en procédant à la vente de crédits compensatoires. Les initiatives visant à vendre des crédits de carbone forestier s’accentuent, autant sur le marché volontaire que sur le marché réglementaire. Bien que ces deux marchés soient distincts, ils fonctionnent selon les mêmes préceptes.

La reconnaissance des projets

Il faut s’attarder aux 7 critères reconnus internationalement pour identifier et comprendre le fonctionnement des crédits de carbone forestier.

  • 1

    Réel : les gains revendiqués tiennent compte des émissions de CO2 du projet. De plus, les bénéfices ne doivent pas conduire à un déplacement des émissions, soit au principe de la « fuite ». Ainsi, selon certaines normes, la reconnaissance d’un boisement ne peut pas se faire au détriment du déboisement d’un autre secteur d’une propriété.

  • 2

    Additionnel : les crédits ne sont accordés que pour le carbone supplémentaire séquestré par rapport à celui quantifié dans un scénario de référence (en absence du projet).

Sur le radar en 2023

Comme chaque début d’année, la FPFQ retrace les grands enjeux susceptibles d’avoir des impacts sur les activités des producteurs forestiers en 2023. Voici une vingtaine de dossiers à surveiller.

Revenus des producteurs forestiers et marché des produits forestiers

  • 1

    La Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier priorise l’approvisionnement en bois des forêts privées au détriment de celui des forêts publiques, qualifié de résiduel, dans les scénarios d’approvisionnement des usines de transformation du bois. Dans ce contexte, le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) a consulté à la fois les syndicats et les offices de producteurs forestiers afin de déterminer l’offre de bois de la forêt privée et les bénéficiaires de droits forestiers sur les volumes potentiels qu’ils pourraient obtenir de la forêt publique. En début d’année, le MRNF devrait se prononcer sur les garanties d’approvisionnement en bois des forêts publiques pour la période 2023-2028. Cette consultation est essentielle, mais demeure insuffisante considérant que les scénarios d’approvisionnement sont fréquemment modifiés par les ventes de gré à gré et le recours aux plans spéciaux de récupération qui accroissent l’offre de bois des forêts publiques. La FPFQ poursuivra ses représentations afin d’assurer le respect du principe de résidualité.

  • 2

    Les politiques monétaires mises en place par les gouvernements pendant la crise économique, les disruptions des chaînes d’approvisionnement au cours de la pandémie et la guerre en Ukraine ont créé une inflation persistante que tentent de casser les banques centrales en haussant les taux directeurs. Cette action visant à refroidir l’économie en surchauffe ralentira le marché immobilier. Après deux années fastes sur les marchés des produits forestiers, 2023 sera beaucoup plus morose.

Portrait économique des activités sylvicoles et de la transformation du bois des forêts privées

Annuellement, des dizaines de milliers de propriétaires forestiers contribuent à générer une activité économique structurante pour les communautés rurales par la mise en valeur des potentiels sylvicoles de leurs lots boisés. En premier lieu, la sylviculture des forêts privées nécessite une panoplie de services d’aménagement forestier pour accompagner les propriétaires dans la planification, la réalisation des travaux sylvicoles et la commercialisation du bois. En second lieu, le bois récolté, puis transformé par l’industrie forestière, est essentiel à la fabrication de nombreux produits forestiers.

Bien que les informations portant sur les emplois et sur l’activité de l’industrie forestière sont connues, les données associées aux activités sylvicoles sur le territoire privé doivent faire l’objet d’un recensement spécifique. Un premier recensement avait été réalisé pour l’année 2012, puis un deuxième pour l’année 2018. Cette nouvelle version du portrait économique pour l’année 2021 extrapole les résultats des recensements précédents afin d’évaluer les données à ce jour.

Cette étude réalisée par la FPFQ décrit le chiffre d’affaires et les emplois liés aux activités sylvicoles et à la transformation du bois des forêts privées en 2021 pour chaque maillon de la filière en considérant le soutien gouvernemental accordé. Les activités décrites dans cette étude ne tiennent pas compte des autres activités économiques se déroulant en forêt privée, comme l’acériculture, la chasse ou la villégiature. Les biens et services environnementaux générés par les forêts privées sont également exclus.

Résultats

Les activités sylvicoles et la transformation du bois des forêts privées ont créé un peu plus de 24 300 emplois au Québec et généré un chiffre d’affaires de 4,7 G$ en 2021. Les emplois incluent les propriétaires de boisés qui ont obtenu un paiement pour la récolte de bois, les professionnels et les techniciens forestiers qui les accompagnent, les entrepreneurs forestiers, les ouvriers sylvicoles, les camionneurs et la portion des travailleurs en usine pour la transformation du bois de la forêt privée.

Diminution globale de l’intensité de l’épidémie de tordeuse en 2022

En 2022, l’épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette (tordeuse) a évolué de façon asymétrique d’une région à l’autre, mais dans l’ensemble, son intensité s’est amenuisée en forêt privée.

Néanmoins, l’inventaire aérien effectué par le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) démontre toujours une grande présence de l’insecte dans les boisés privés du Québec. Les superficies ont régressé d’environ 346 000 ha d’une année à l’autre pour atteindre 938 000 ha. Il faut toutefois mentionner que ces résultats sont présentés à l’échelle du paysage. Si on considère uniquement les peuplements vulnérables à la tordeuse, les superficies infestées s’avèrent beaucoup moins élevées.

Les enjeux des changements climatiques en forêt privée

Les 134 000 propriétaires forestiers du Québec risquent d’être aux premières loges pour constater les conséquences des changements climatiques. C’est le constat qui ressort du rapport Le Canada dans un climat en changement (Chapitre 2 – Québec, rédigé par Ouranos) du gouvernement fédéral ainsi que le projet de stratégie d’adaptation de la gestion et de l’aménagement des forêts aux changements climatiques du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP).

L’évolution du climat causera des impacts aux écosystèmes au-delà de leur capacité d’adaptation, conduira à des modifications de la biodiversité, affectera la façon d’assurer une saine gestion du territoire forestier et augmentera les risques en santé et sécurité pour les travailleurs du secteur forestier.

Les propriétaires forestiers constateront un peu plus chaque année l’ampleur et la diversité de ces conséquences sur leurs boisés. En parallèle, les forêts privées constitueront pour l’ensemble des Québécois une vitrine de l’impact des changements climatiques sur les écosystèmes forestiers en raison de leur localisation à proximité des milieux de vie des citoyens.

Élections québécoises 2022

Le 3 octobre 2022, les 134 000 propriétaires forestiers et leur famille seront appelés à voter dans le cadre des élections provinciales. La FPFQ est intervenue, de concert avec Groupements forestiers Québec, pour rappeler aux candidats aux élections que leur engagement peut déterminer le sort de centaines de communautés rurales qui dépendent du secteur forestier.

Les engagements recherchés par les producteurs et propriétaires forestiers

Dans une lettre expédiée aux chefs des cinq principaux partis politiques, les deux organisations ont sensibilisé les formations visant à former le prochain gouvernement que celui-ci devra axer ses interventions sur quatre éléments essentiels afin de soutenir les propriétaires forestiers qui désirent mettre en valeur leurs boisés.

  • 1

    Accroître les mesures de soutien à la sylviculture en majorant le Programme d’aide à la mise en valeur des forêts privées à 41,1 M$, en prévoyant un mécanisme d’indexation et en s’engageant pour une période de 5 ans.

  • 2

    Sécuriser l’accès aux marchés pour le bois des forêts privées en améliorant l’accessibilité au marché pour les producteurs de bois conformément à l’intention ayant guidé l’adoption du principe de la résidualité.

  • 3

    Améliorer la productivité et l’accès à la main-d’œuvre en accélérant l’innovation en forêt privée, en mettant en œuvre des mesures afin de faciliter le recrutement et en améliorant les conditions de la main-d’œuvre forestière.

  • 4

    Favoriser l’adoption de meilleures pratiques environnementales en finançant l’intégration de nouvelles connaissances environnementales aux plans d’aménagement forestier, en forçant l’application des réglementations sur la protection du couvert forestier à l’échelle des MRC ainsi qu’en mettant en œuvre un programme d’indemnisation des producteurs forestiers qui subissent des contraintes déraisonnables pour répondre aux besoins sociétaux.

Vague de consolidations dans le secteur forestier

L’industrie forestière du Québec a attiré l’attention de bien des gens ces dernières années alors que se sont multipliés les nouvelles d’acquisitions, les fusions et les investissements. Les multiples transactions se chiffrent en milliards de dollars.

Dernière en lice, Paper Excellence a acquis coup sur coup Domtar puis Produits forestiers Résolu. Du jour au lendemain, une compagnie aux origines indonésiennes consolidait deux institutions de l’industrie forestière québécoise. Plusieurs autres exemples de transactions illustrent parfaitement le phénomène de consolidation qui a actuellement cours.

Principales transactions survenues dans le secteur forestier québécois

La consolidation du secteur forestier ne date pas d’hier. En tout temps, les entreprises de ce secteur ont cherché à accroître leur compétitivité et parfois,  la consolidation a constitué une option rationnelle pour se démarquer sur les marchés. La consolidation d’un secteur peut s’effectuer à la fois par une intégration horizontale et verticale des activités.

La forêt privée chiffrée 2022 et retour sur le congrès 2022

Après deux années de report en raison de la pandémie de COVID-19, le congrès de la FPFQ a eu lieu à l’hôtel Travelodge de Québec les 2 et 3 juin derniers. Sous le thème « Biens et services environnementaux à vendre! », ce congrès a été l’occasion pour les membres et plusieurs intervenants du milieu de discuter de l’ensemble des biens et services environnementaux rendus aux collectivités par les propriétaires forestiers. Cette occasion aura permis aux producteurs d’amorcer une réflexion sur les moyens à envisager pour les soutenir. À cet effet, la FPFQ en a profité pour dévoiler officiellement la 5e édition du guide terrain des saines pratiques d’intervention en forêt privée.

Du changement à la présidence de la FPFQ

Après 17 années à la présidence de la FPFQ, M. Pierre-Maurice Gagnon s’est retiré à la suite de l’assemblée générale annuelle de la FPFQ le 3 juin dernier. M. Gaétan Boudreault, alors 1er vice-président, assurera la présidence par intérim jusqu’à la prochaine assemblée générale annuelle.

Le passage de M. Pierre-Maurice Gagnon à la tête de la FPFQ aura été marqué par ses qualités de rassembleur et son sourire contagieux. Son dévouement sans relâche pour la défense des intérêts des propriétaires et producteurs forestiers a toujours imprégné les actions de la FPFQ. C’est par son implication considérable au sein de la fédération qu’il a su sensibiliser les différents partenaires et le gouvernement à propos des enjeux vécus par les producteurs.

Gaétan Boudreault, président par intérim et Pierre-Maurice Gagnon, président sortant de la FPFQ

Aménager son boisé en maintenant les espèces à statut précaire, les milieux sensibles et la biodiversité – Un outil pour les propriétaires forestiers

Les propriétaires forestiers sont des acteurs de premier plan dans la sauvegarde de plusieurs espèces en situation précaire. Contrairement à certaines idées préconçues, la protection des espèces et l’aménagement forestier ne sont pas incompatibles. En effet, la faune et la flore s’adaptent généralement bien à un certain niveau de perturbations naturelles qui s’apparentent à diverses interventions forestières. À titre d’exemple, le jardinage peut imiter un chablis partiel, alors que certaines coupes totales irrégulières peuvent calquer une épidémie de tordeuse.

Les propriétaires de lots boisés peuvent ainsi protéger les milieux sensibles et maintenir la biodiversité tout en réalisant des activités d’aménagement forestier. Dès l’étape de la planification, on peut identifier deux grandes stratégies pour atteindre ces objectifs. D’une part, nous pouvons appliquer le concept de filtre brut qui vise à conserver la qualité des habitats, et d’autre part, nous pouvons appliquer le concept de filtre fin qui se définit par l’application de mesures spécifiques d’intervention visant à protéger certaines espèces nécessitant des besoins particuliers.

Maintenir la qualité des habitats avec le filtre brut
L’application de saines pratiques d’aménagement forestier permet déjà de protéger la majorité des espèces qui vivent en milieu forestier. Par exemple, la conservation de chicots sécuritaires lors des activités de récolte est bénéfique à plusieurs espèces qui s’y abritent. De saines pratiques permettent ainsi de préserver l’habitat de plusieurs espèces, et ce, sans même savoir si ces espèces sont effectivement présentes. Le haut de la figure ci-contre présente des types et des structures d’habitats où de saines pratiques d’aménagement permettent de maintenir un habitat favorable à plusieurs espèces.

Rappelons que pour maintenir une diversité d’habitats, il faut éviter de traiter la forêt de la même façon partout. En offrant une diversité d’habitats, chaque
espèce pourra y trouver son compte.

Appliquer des mesures spécifiques pour certaines espèces avec le filtre fin
Parfois, le maintien des caractéristiques des habitats ne permet pas toujours à lui seul de préserver l’ensemble de la biodiversité. Certaines espèces nécessitent des mesures de mitigation plus spécifiques. À titre d’exemple, la protection de l’ail des bois nécessite de localiser la colonie avant de pouvoir appliquer des modalités d’intervention spécifiques afin de préserver l’espèce. Dans ce cas précis, la réalisation d’interventions sur le parterre de la colonie doit s’effectuer pendant la saison hivernale afin de protéger les plants. Le bas de la figure ci-contre présente d’autres exemples de mesures de mitigation spécifiques.

La mobilisation des propriétaires forestiers et la récolte de bois

Mobiliser le bois des forêts privées
Avec une possibilité forestière de 17 Mm³, la forêt privée du Québec recèle un potentiel fort intéressant pour assurer le développement de l’industrie forestière dans plusieurs régions et la pérennisation de l’activité économique en découlant. Ce potentiel se traduit par une cible de récolte de l’ordre de 7,8 Mm³ de bois chaque année selon la Stratégie nationale de production de bois du MFFP. L’embellie sur les marchés a profité aux producteurs forestiers du Québec en 2021. Avec 6,7 Mm³ de bois rond livré, les producteurs n’avaient pas connu un tel rythme de récolte depuis 2000. Néanmoins, ce résultat demeure toujours en deçà de la cible visée.

Bon an mal an, la FPFQ estime que de 15 000 à 20 000 producteurs forestiers mettent en marché du bois à près de 200 usines de transformation à travers le Québec. Or, une plus grande participation des 134 000 propriétaires forestiers québécois à la récolte de bois est nécessaire pour soutenir le rythme actuel de récolte et atteindre les objectifs. La mobilisation des propriétaires forestiers doit s’inscrire dans une démarche globale où l’accroissement de la récolte en forêt privée s’intègre de prime abord à leurs besoins, et ce, tout en s’arrimant aux préoccupations environnementales soulevées par les communautés.

Le déclin du nombre de producteurs forestiers enregistrés
De moins en moins de propriétaires de lots boisés se prévalent du statut de producteurs forestiers leur permettant de bénéficier de programmes et mesures gouvernementales favorisant la production forestière. En effet, le nombre de producteurs forestiers enregistrés suit une trajectoire descendante depuis un sommet atteint en 1996. Aujourd’hui, à peine 21 % des propriétaires forestiers québécois peuvent se targuer de détenir ce certificat. Ce déclin est vraisemblablement attribuable à plusieurs facteurs, dont la faible rentabilité de la production forestière, le changement dans le profil des propriétaires forestiers, l’évolution des règles d’attribution des budgets de mise en valeur des forêts privées et la fin du financement direct des plans d’aménagement forestier à compter de 2012.

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