1er juillet : date limite pour protéger les investissements sylvicoles contre la tordeuse des bourgeons de l’épinette

Une épidémie de tordeuse des bourgeons de l’épinette (tordeuse) sévit au Québec depuis 2006. Les propriétaires dont les boisés sont affectés par l’épidémie sont invités à récolter les peuplements matures vulnérables afin de limiter la perte de bois. Toutefois, les peuplements immatures ayant bénéficié d’investissements de l’État peuvent recourir au Programme de protection par pulvérisation aérienne d’insecticide biologique pour la petite forêt privée, financé par le ministère des Ressources naturelles et des forêts (MRNF). La mise en œuvre du programme est principalement confiée à la Société de protection des forêts contre les insectes et maladies (SOPFIM), mais la responsabilité de la protection des investissements sylvicoles contre la tordeuse en forêt privée incombe également aux propriétaires et aux conseillers forestiers. Les superficies à protéger doivent être identifiées avant le premier juillet de l’année précédant les arrosages. Voici un résumé du partage des responsabilités dans la protection des investissements sylvicoles.

Le partage des responsabilités dans la lutte contre la tordeuse en forêt privée

Le programme de protection des pulvérisations aériennes d’insecticide biologique contre la tordeuse pour la petite forêt privée

Pour bénéficier d’un arrosage dans le cadre du programme de protection contre la tordeuse pour la petite forêt privée, les peuplements forestiers doivent respecter les critères du MRNF suivants :

  • localisés sur des lots appartenant à des propriétaires reconnus comme producteurs forestiers;
  • composés principalement d’essences vulnérables à l’insecte, soit le sapin baumier, l’épinette blanche et l’épinette de Norvège;
  • issus d’investissements sylvicoles de l’État comme des plantations ou des éclaircies précommerciales et commerciales;
  • immatures âgés de 21 à 60 ans (non mûrs pour la récolte de prévention et de récupération);
  • affectés par l’insecte pendant au moins une année;
  • d’une superficie de plus de quatre hectares (la superficie minimale peut être composée de peuplements contigus);
  • le propriétaire s’engage à ne pas récolter son peuplement protégé dans un délai minimal de cinq ans à compter de la première année d’intervention.

En 2024, les régions admissibles par ce programme sont l’Abitibi-Témiscamingue, le Bas-Saint-Laurent, la Capitale-Nationale, Chaudière-Appalaches, la Côte-Nord, la Gaspésie, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, l’Outaouais, les Laurentides, Lanaudière et la Mauricie. D’autres régions pourraient éventuellement bénéficier du programme de protection selon l’évolution de cette épidémie au cours des prochaines années.

Pour de plus amples renseignements, pour la recherche d’un conseiller forestier ou pour visualiser la progression de l’infestation dans votre région, nous vous invitons à consulter la section tordeuse du site Web de la Fédération des producteurs forestiers du Québec au www.foretprivee.ca/tordeuse.

Soubresaut de l’épidémie de la tordeuse en 2023

L’épidémie de tordeuse des bourgeons de l’épinette (tordeuse) sévit depuis 2006 en forêt privée. Cette année, les superficies défoliées ont diminué fortement pour une deuxième année consécutive. Toutefois, la dernière année a été marquée par l’apparition de nouveaux foyers d’infestation et une forte hausse de l’intensité des dégâts.

L’inventaire aérien effectué par le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) démontre que les superficies infestées en forêt privée ont régressé d’environ 232 000 ha depuis l’an dernier pour atteindre 705 000 ha en 2023. Cette diminution est en grande partie attribuable à un déclin significatif de l’épidémie au Bas-St-Laurent. Il est impossible de savoir si cette diminution est temporaire ou si nous pourrions assister à une résurgence de l’infestation au cours des prochaines années.

On remarque cependant que l’intensité des dégâts s’est accentué par rapport à l’an dernier. En 2022, les superficies touchées présentaient pour la plupart une défoliation légère, seulement 10 % se trouvaient dans les classes de défoliation modérée ou grave. En 2023, c’est plus d’un tiers (36 %) des superficies qui sont touchées d’une défoliation grave à modérée.

 

L’épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette prend de l’ampleur en forêt privée

Photo aérienne montrant un peuplement dont les essences d'arbres sont plus ou moins affectées par la tordeuse. Crédit photo : Enviro-Foto

Une importante épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette sévit actuellement au Québec. Aussi appelée TBE ou tordeuse, il s’agit de l’insecte le plus destructeur des peuplements de conifères en Amérique du Nord. Déjà, 13,5 millions d’hectares sont infestés par l’insecte, dont 1,26 million d’hectares de boisés privés. La Fédération des producteurs forestiers du Québec (FPFQ) estime qu’environ 25 000 propriétaires de lots boisés subissent actuellement les conséquences de cette épidémie, quoique l’ampleur des dommages varie énormément d’une région à l’autre.

Les municipalités ont un rôle à jouer dans la gestion de cette catastrophe naturelle qui aura des conséquences négatives importantes sur le couvert forestier régional. Bien que cet insecte fasse partie du cycle naturel de la régénération des forêts résineuses, il faut prévoir dans l’immédiat des récoltes de récupération des peuplements forestiers vulnérables à l’insecte, et ce, afin d’éviter la mort des arbres sur pied. Rappelons que la surmortalité des arbres dans un peuplement peut augmenter les risques d’incendie forestier, nuire aux activités récréatives, accroître les risques d’accident chez les personnes y circulant et entraver les activités de reboisement nécessaires lorsque la régénération naturelle est déficiente. Ces récoltes hâtives ou de récupération nécessiteront l’émission de permis d’abattage d’arbres pour des situations qui ne sont pas toujours prévues aux règlements municipaux.

Superficies infestées par la tordeuse en 2020

Afin d’accroître la protection des investissements sylvicoles, le gouvernement du Québec a investi 20 M$ dans un programme de pulvérisations aériennes d’insecticide biologique contre la tordeuse dans les petites forêts privées. Des arrosages d’insecticide biologique ayant lieu depuis l’été 2018 auront cours jusqu’à la fin du programme en mars 2023. La mise en œuvre est confiée à la Société de protection des forêts contre les insectes et maladies (SOPFIM) qui travaille en collaboration avec les intervenants œuvrant en forêt privée. En 2020, la superficie totale traitée par arrosage s’est élevée à 17 610 hectares, soit 2 fois plus que l’année précédente en raison de l’assouplissement du critère d’admissibilité lié à la superficie minimale d’arrosage, qui est passée de 10 à 4 hectares. Par ailleurs, la forêt privée de l’Abitibi sera admissible aux arrosages en 2022 et les conseillers forestiers travaillent présentement à répertorier les superficies admissibles.

Superficies de petites forêts privées traitées par la SOPFIM

L’insecte s’attaque principalement au feuillage annuel du sapin baumier, de l’épinette blanche, de l’épinette de Norvège, ainsi qu’à un degré moindre, de l’épinette rouge et de l’épinette noire. Le sapin baumier est l’essence la plus à risque de mourir à la suite des attaques répétées de la tordeuse. Cette vulnérabilité des arbres à la mortalité augmente avec l’âge, la densité des peuplements ou la présence sur des sites peu productifs, par exemple lorsque le sol est trop sec ou trop humide. Au moins 4 années rapprochées de défoliation grave suffisent à tuer les premiers arbres. Ceci laisse donc un certain temps aux forestiers pour réagir et récupérer le bois avant que les pertes ne s’accumulent.

Défoliation grave des sapins dans un boisé privé de la région de Témiscouata

D’après les experts, il est impossible de prédire l’évolution de l’épidémie au cours des prochaines années, mais toutes les régions ayant des peuplements forestiers vulnérables à la tordeuse risquent de subir des dommages. Les conséquences de cette épidémie sont graves pour les propriétaires de boisés et les communautés rurales. Lors de la dernière épidémie, le retard pris dans les actions pour contrer ses effets a provoqué le dépérissement des forêts de nombreux propriétaires forestiers qui n’ont pu intervenir efficacement pour limiter les pertes.

Au niveau provincial, la Fédération des producteurs forestiers du Québec, Groupements forestiers Québec et le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs ont formé une cellule d’urgence afin de coordonner les actions à réaliser sur une base provinciale et régionale pour atténuer les impacts pour les propriétaires de boisés et les communautés rurales.

Au niveau régional, une des premières étapes pour les municipalités est de prendre conscience de la vulnérabilité des peuplements forestiers. Cette vulnérabilité dépend en grande partie de la présence du sapin mature dans les peuplements forestiers. Afin de rendre accessibles ces informations aux gestionnaires municipaux, la FPFQ a publié une carte interactive qui permet de visualiser la situation de l’épidémie ainsi que les peuplements forestiers vulnérables, et ce, d’après une analyse cartographique développée par le MFFP.

Carte interactive montrant les peuplements vulnérables à la tordeuse

Au niveau du lot boisé, les propriétaires voulant limiter le dépérissement de leur forêt peuvent se préparer et agir pour atténuer les impacts. Ainsi, il est fortement recommandé de procéder à la récolte des sapinières et pressières blanches matures avant l’arrivée de l’épidémie afin d’éviter les pertes de bois. Cette récolte hâtive permet de favoriser l’établissement de jeunes peuplements plus diversifiés et donc plus résistants aux attaques de l’insecte. D’autres travaux sylvicoles préventifs peuvent aussi être réalisés. Ils consistent à diminuer la présence de sapins et à modifier la composition des peuplements pour favoriser la présence d’essences moins vulnérables à l’insecte. Afin de pouvoir bénéficier des programmes d’aide et des conseils professionnels, les propriétaires sont invités à s’enregistrer comme producteur forestier.

Récolte dans un peuplement mixte à dominance de sapin gravement affecté dans la région du Témiscouata

Les propriétaires de boisés subissent présentement les contrecoups de cette épidémie. Alors qu’ils sont encouragés à récolter les peuplements forestiers fortement infestés, ils veulent aussi s’assurer du rétablissement d’une régénération forestière adéquate des superficies récoltées. Cette demande est importante pour les propriétaires, mais également pour les régions rurales qui misent sur la ressource forestière pour soutenir leur développement. C’est pourquoi la production de plants forestiers en pépinière et les budgets d’aménagement forestiers sont importants pour les régions affectées par la tordeuse.  

Les municipalités peuvent contribuer au succès de la lutte contre l’épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette en intervenant de plusieurs façons tout au long du processus. Les municipalités peuvent assouplir leur processus d’émission de permis de récolte afin d’inciter les propriétaires de boisés à procéder à des interventions hâtives ou de récupération. Ils peuvent suivre l’évolution de l’épidémie et avertir les propriétaires de boisés à risque de subir des dommages. Ils peuvent prévenir les citoyens lorsque des campagnes d’arrosage ont lieu. Finalement, ils peuvent soutenir les efforts d’aménagement des producteurs forestiers qui veulent accroître la santé et la résilience des forêts de leurs boisés en diminuant le fardeau fiscal des immeubles forestiers.

Activités municipales pouvant appuyer les démarches pour atténuer les impacts de l’épidémie de tordeuse

La FPFQ continuera de suivre l’épidémie en forêt privée et de proposer des solutions visant l’atténuation des impacts. Pour tout savoir sur l’épidémie en cours, consultez le foretprivee.ca/tordeuse.

L’épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette et mon boisé

L’actuelle épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette a débuté en 1992 dans le sud-ouest du Québec, près de la ville de Gatineau. Depuis 2006, les superficies touchées ont augmenté rapidement dans certaines régions du Québec, dont la Côte-Nord, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, l’Abitibi-Témiscamingue, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine. Le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) suit la situation de près sur le terrain. Chaque année, il effectue dans les forêts du Québec un relevé aérien des dommages causés par divers insectes, dont ceux liés à la tordeuse des bourgeons de l’épinette. Pour avoir un aperçu de la situation, consultez les résultats de ce relevé annuel dans la section « Protection du milieu forestier » du site Web du MFFP. www.mffp.gouv.qc.ca/forets/fimaq/insectes/fimaq-insectes-portrait-faits.jsp

Devrais-je me préoccuper  de la tordeuse?

Vous devriez vous en préoccuper lorsque vous aménagez la forêt. En effet, après plusieurs années consécutives de défoliation grave causée par la tordeuse, une partie plus ou moins importante des arbres peut mourir, occasionnant des pertes de revenus. Deux éléments peuvent vous aider à déterminer s’il y a lieu de vous inquiéter : la susceptibilité des arbres et leur vulnérabilité.

Susceptibilité des arbres

La susceptibilité exprime la probabilité qu’un arbre subisse une défoliation sans nécessairement en mourir. Contrairement au feu qui peut détruire tous les arbres sur son passage, la tordeuse n’affecte que certaines espèces, ne tue pas tous les arbres qu’elle touche et met plusieurs années à le faire lorsque c’est le cas. Elle peut se nourrir des aiguilles du sapin baumier ou de celles des diverses sortes d’épinettes (blanche, rouge, noire et de Norvège) peu importe leur âge, que ces arbres soient dans des forêts feuillues, mélangées ou résineuses.

Vulnérabilité des arbres

La vulnérabilité exprime la probabilité que les arbres meurent après plusieurs années rapprochées de défoliation grave. Le sapin est nettement plus vulnérable que les épinettes, et sa vulnérabilité augmente avec l’âge et la densité des peuplements dans lesquels on le trouve. Dans une vieille sapinière, ce sont généralement les arbres les plus chétifs qui meurent en premier lors d’une épidémie. L’épinette blanche peut aussi être vulnérable, entre autres lorsqu’elle a été plantée dans un sol appauvri, lorsqu’elle croît dans un sol trop sec ou trop humide ou lorsqu’elle est très âgée.

Si vous êtes producteur forestier et que le sapin, particulièrement le sapin âgé, occupe une place importante dans votre boisé, vous devez être encore plus vigilant.

La description de la forêt dans le plan d’aménagement forestier de votre boisé permet de cibler les peuplements les plus à risque, notamment les sapinières âgées. Plus le volume de sapins est important, plus votre boisé est vulnérable, particulièrement si l’épidémie y sévit déjà et que vous souhaitez aménager ces peuplements. Votre conseiller forestier peut vous aider à trouver les peuplements les plus à risque de votre boisé.

L'insecte

Qu’est-ce que la tordeuse des bourgeons de l’épinette? 

Le cycle de vie de la tordeuse se déroule en une seule année. Il compte un stade oeuf, six stades chenilles (larvaire), un stade chrysalide et un stade adulte, celui du papillon.

Les dommages

L’épidémie touche-t-elle mon boisé?

Défoliation des pousses annuelles

Il est important d’évaluer l’état réel de votre boisé, si possible avec l’aide de votre conseiller forestier. Lors d’une première année de défoliation modérée ou grave, vous observerez dès la fin du mois de juin la teinte rougeâtre des arbres, due à la présence d’aiguilles mortes attachées aux extrémités des branches. Pour repérer cette défoliation, on doit d’abord regarder la tête et l’ensemble du houppier des épinettes blanches ou des sapins les plus hauts du peuplement. Au fil des ans, les arbres défoliés prennent une teinte grisâtre.

Vous pouvez avoir une idée du nombre d’années de défoliation en observant l’extrémité des branches, puisque les traces de la défoliation s’accumulent au fil des ans sur l’arbre.

Défoliation grave d'une pousse annuelle
Défoliation grave des pousses annuelles des deux dernières années de croissance de l'arbre

L'aménagement en période d'épidémie

Si l’épidémie ne touche pas encore votre boisé et que vous songez à faire une récolte, choisissez les arbres ou les peuplements les plus vulnérables, comme les vieilles sapinières. Vous auriez avantage à vous faire conseiller, car déterminer la bonne façon d’agir dépend de plusieurs facteurs et une action rapide vous permettra d’atténuer le risque de perdre des revenus. Votre conseiller forestier pourra, par exemple, évaluer la possibilité de procéder à des coupes partielles. Cette approche peut présenter de nombreux avantages pour contrer la prolifération d’espèces concurrentes et favoriser l’établissement d’essences désirées. Un bon accès aux secteurs les plus vulnérables de votre boisé sera un atout!

Défoliation totale des arbres

On peut déterminer le risque de mortalité des arbres en évaluant la proportion de feuillage. Les aiguilles du sapin baumier tombent naturellement de cinq à sept ans après avoir poussé. Donc, si la nouvelle pousse est complètement mangée par la tordeuse chaque année, l’arbre n’aura plus aucun aiguille après une période de cinq à sept ans.

Les arbres matures dont l’ensemble du houppier compte moins de 10 % de feuillage sont voués à une mort quasi certaine à brève échéance (moins de deux ans). Ceux qui ont plus de 50 % de leur feuillage ont de bonnes chances de survivre si l’épidémie cesse, sinon ils pourront encore supporter quelques années de défoliation grave avant de succomber. Le sort des arbres auxquels il reste de 10 à 50 % de feuillage est incertain; il dépend notamment de leur vigueur et de la défoliation à venir. Plus le feuillage diminue, plus le risque de mortalité augmente. 

Voici un aperçu du cycle complet d’une épidémie dans les peuplements très vulnérables. La défoliation totale se manifeste par un changement d’apparence générale des arbres, leur couleur passant de vert, lorsqu’ils sont peu ou qu’ils ne sont pas défoliés, à rougeâtre, puis à gris lorsqu’ils sont complètement défoliés.

La surveillance de ces secteurs sera améliorée et la récolte sera facilitée le temps venu.

Dès qu’il y a un signe d’épidémie imminente, vous devriez cesser les éclaircies précommerciales systématiques dans les peuplements composés d’essences vulnérables (sapin baumier et épinettes). L’éclaircie précommerciale systématique comporte à la fois l’élimination des espèces concurrentes, comme les peupliers, et la réduction des résineux en surnombre. Elle devrait être remplacée par le nettoiement qui se limite à éliminer les espèces concurrentes. Le maintien des résineux en surnombre permet de répartir la ponte des papillons sur un plus grand nombre d’arbres, diminuant ainsi la quantité de chenilles par branche. Il permet également de faire face à une mortalité partielle des résineux dans le peuplement. Le dégagement – un traitement qui élimine les espèces concurrentes lorsque les résineux ont moins de deux mètres de haut – devrait continuer à être appliqué dans les plantations d’épinettes dès que l’interception de la lumière par les feuillus atteint 40 %. Dans les peuplements régénérés naturellement, on peut parfois avoir recours au dégagement lorsque la survie des semis est menacées par une végétation concurrente extrêmement dense.

Quant à l’éclaircie commerciale, vous devriez demander conseil avant de la réaliser, car elle pourrait augmenter le risque de chablis en période d’épidémie. En effet, une fois l’éclaircie terminée, si la défoliation entraîne une mortalité partielle des arbres, l’effet combiné de cette mortalité et du traitement peut provoquer une ouverture du couvert trop grande pour que le peuplement puisse résister aux vents.

Comprendre la vulnérabilité du sapin et des épinettes à la suite des traitements sylvicoles

La vulnérabilité des arbres à la tordeuse des bourgeons de l’épinette (sapins, épinettes) augmente lors des travaux de dégagement, d’éclaircie précommerciale et de nettoiement dans les jeunes peuplements et lors des coupes partielles dans les peuplements plus âgés. Tous ces traitements diminuent le nombre d’arbres ou d’arbustes dans un peuplement. L’élimination d’une partie du couvert forestier entrâine des modifications dans l’environnement des arbres (quantité de lumière, température, humidité, nappe phréatique, etc.). Ces modifications stressent les arbres restants pendant quelques années, le temps qu’ils s’adaptent aux nouvelles conditions environnementales. Lordqu’un arbre est stressé, il a une capacité réduite à se défendre contre certains insectes défoliateurs comme la tordeuse. De plus, l’augmentation de la quantité de lumière et de la température dans le peuplement accélère le développement de la tordeuse. Cela favorise sa survie puisqu’elle est exposée moins longtemps aux prédateurs et aux parasites. Finalement, lorsque l’on réduit le nombre de sapins ou d’épinettes, les papillons de la tordeuse présents dans le peuplement pondent leurs oeufs sur moins d’arbres, ce qui aura pour effet de concentrer le nombre de chenilles par arbre. Bref, cette augmentation temporaire de la vulnérabilité des arbres devra sérieusement être prise en compte lorsque vous envisagerez d’effectuer un traitement sylvicole en période d’épidémie.

Jeune épinette blanche touchée par l'épidémie

Que faire si des peuplements matures sont touchés?

Ne paniquez pas. Comme la majorité des peuplements contiennent des arbres peu ou pas vulnérables, seul un certain nombre d’arbres seront éliminés, tans que les autres profiteront à moyen terme des trouées laissées par ceux qui sont morts. Les peuplements très vulnérables, par exemple les vieilles sapinières pures où une majorité d’arbres matures pourraient mourir, vont se régénérer naturellement. 

Si votre boisé est gravement atteint et que vous souhaitez faire une récolte pour minimiser vos pertes de revenus, il est primordial de consulter votre conseiller forestier. Ce dernier déterminera la bonne façon d’agir en tenant compte de plusieurs facteurs liés à la fois au peuplement (objectif sylvicole, végétations concurrentes, régénération en place), à sa vulnérabilité à la tordeuse et à la gravité de la défoliation.

Il faut habituellement au moins quatre années rapprochées de défoliation grave des pousses avant que les premiers arbres meurent. Ce sont ceux dont la valeur économique est moindre, les plus faibles et les plus chétifs, qui meurent en premier. La mortalité progresse par la suite à un rythme variable et culmine environ dix ans après le début de l'épidémie. Plus l'épidémie est détectée tôt, plus vous aurez le temps de réagir, d'où l'importance de suivre la situation de près.

La récolte

Mes arbres ont-ils encore une valeur pour la transformation?

Le bois reste sain tant que l’arbre est vivant, même s’il est très défolié et que sa tête est morte ou cassée. Lorsque les arbres sont moribonds ou viennent de mourir, des insectes et des champignons entreprennent le processus de dégradation du bois. Vous devez donc vérifier les standards de qualité du bois recherchés par les acheteurs avant de procéder à la récolte, car ces standards peuvent varier selon la destination et l’usage du bois : sciage ou pâtes et papiers.

Les plantations et les jeunes forêts

Qu’adviendra-t-il de mes plantations d’épinette blanche?

Il existe peu de documentation sur la réaction des plantations d’épinette blanche aux épidémies de la tordeuse puisque la majorité des plantations au Québec ont été faites depuis la dernière épidémie. Toutefois, on sait que celles qui existaient avant la dernière épidémie ont survécu. De façon générale, les plantations d’épinette noire, rouge ou de Norvège ne sont pas préoccupantes. C’est aussi le cas pour les jeunes plantations d’épinette blanche. Par contre, les plantations d’épinette blanche de plus de quarante ans, établies sur un site appauvri (ancienne friche), trop sec ou trop humide, et dont les arbres ont un houppier clairsemé, peuvent être plus vulnérables.

Qu’adviendra-t-il des jeunes peuplements de moins de 30 ans gravement défoliés?

Même s’ils sont susceptibles de subir une défoliation, on sait que les jeunes sapins sont moins vulnérables que les plus âgés. Il y a donc une forte probabilité que la majorité de ces jeunes sapinières, établies sur de bons sites (frais ou humides), survivent malgré l’apparence grisâtre peu rassurante qu’elles pourraient avoir à la suite de défoliations graves et répétées. Il en va de même pour les jeunes peuplements éclaircis depuis assez longtemps pour qu’ils soient moins vulnérables à la tordeuse. Soyez patient et ne concluez pas trop rapidement qu’ils sont perdus uniquement à cause de leur apparence.

Ne vous méprenez pas

Faites la distinction entre la brûlure des pousses du sapin et les dommages causés par la tordeuse

Dommages causés par Delphinella balsameae
Dommages causés par la tordeuse des bourgeons de l'épinette

La brûlure des pousses du sapin est une maladie causée par le champignon Delphinella balsameae qui affecte le sapin baumier. Depuis quelques années, sa présence augmente dans plusieurs régions du Québec, dont le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, les Laurentides et l’Estrie. Le champignon qui cause la brûlure s’attaque plus particulièrement aux jeunes arbres, mais il peut aussi affecter les plus vieux. Les premiers arbres à être atteints se trouvent souvent le long des cours d’eau. L’infection a lieu sur les pousses très tôt après le débourrement des bourgeons, mais en général elle ne compromet pas la survie de l’arbre.

La tordeuse attaque la tête de l’arbre en premier alors que le champignon affecte d’abord la partie inférieure du houppier et ne touche généralement pas à la tête. Par ailleurs, les aiguilles ne sont pas mangées, comme c’est le cas de celles touchées par la tordeuse. Le champignon cause un rougissement de la pousse annuelle ou de quelques aiguilles qui flétrissent puis se recroquevillent.

Article paru dans la revue Forêts de chez nous, édition septembre 2015.

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