On me parle beaucoup de la nouvelle génération de propriétaires forestiers qui sera, semble-t-il, différente de celle qui la précède.
Les acteurs du secteur forestier se questionnent sur l’impact qu’auront ces nouveaux propriétaires sur la mobilisation des bois en forêt privée. Il s’agit d’une question légitime que je me pose aussi puisque j’espère transférer mes boisés à mes filles. Seront-elles aussi actives dans leurs forêts que moi? Le seront-elles de la même façon?
Le changement de génération ne devrait pas occulter que certains éléments fondamentaux demeureront les mêmes, peu importe les nouveaux propriétaires. Premièrement, la sylviculture est une activité risquée présentant une rentabilité incertaine pour un particulier. En conséquence, la récolte de bois et l’obtention d’un revenu d’appoint ne seront pas les motivations principales d’une majorité de propriétaires. L’État qui souhaite utiliser cet actif privé pour créer des retombées économiques devra donc continuer de mettre en œuvre des mesures incitatives pour les encourager à entreprendre des travaux sylvicoles. De plus, la petite taille des propriétés forestières continuera de nécessiter une mise en marché de volumes de bois agglomérés pour optimiser la logistique. Enfin, le niveau de concentration de l’industrie forestière et la concurrence exercée par la forêt publique demandent encore l’établissement de mesures pour équilibrer le rapport de forces et favoriser l’accès aux marchés.
Il s’agit de bonnes nouvelles pour la constellation d’organismes œuvrant en forêt privée, puisque les nouveaux propriétaires auront besoin de leurs services. Toutefois, je crois que la nouvelle génération sera plus exigeante et qu’elle n’hésitera pas à critiquer des pratiques que nous tenions pour acquises. Ce sera une différence importante.
Pierre-Maurice Gagnon
Producteur et Président de la Fédération des producteurs forestiers du Québec
. Éditorial paru dans la revue Forêts de chez nous, édition de novembre 2015