Le dynamisme de l’activité immobilière aux États-Unis continue d’éclipser le reste de l’économie. Après 10 mois de pandémie, les dépenses de consommation en services sont toujours fortement en recul, tandis que celles des biens durables, comme les maisons et les voitures, n’ont jamais été aussi importantes. Évidemment, la baisse des taux d’intérêt à des niveaux planchers, un soutien fiscal important et les mesures de distanciation sociale alimentent le boom du secteur immobilier. Ce dynamisme est notamment lié à la résilience du marché de l’emploi des universitaires. Précisions que cette catégorie de travailleurs a déjà retrouvé le plein emploi. Or, l’implantation du télétravail à grande échelle chez ces travailleurs a grandement favorisé la construction de maisons unifamiliales en banlieue ou en milieu rural.

Par conséquent, la hausse des activités de construction résidentielle a accru la demande pour le bois d’œuvre résineux. Ce produit a surpassé toutes les attentes en 2020 et est très bien positionné pour connaître une excellente année 2021 alors que le consensus table sur une croissance de 10,2 % de la construction de résidences unifamiliales aux États-Unis.

Cette progression soutenue arrive au moment où la capacité de production de l’industrie nord-américaine de bois d’œuvre est sous pression. À court terme, les niveaux d’inventaires sont nettement insuffisants pour satisfaire la demande sous-jacente, tandis qu’à moyen terme, le déclin de la production en Colombie-Britannique limite la probabilité d’une forte réponse à mesure que la possibilité forestière de cette région diminue. Ainsi, l’équilibre du marché du bois d’œuvre repose en grande partie sur la capacité du Sud des États-Unis d’accroître rapidement sa production afin d’augmenter l’offre sur le marché nord-américain. Bien que plusieurs investissements aient été annoncés dernièrement dans cette région, il reste à voir si ceux-ci permettront de produire suffisamment de bois d’œuvre rapidement.

Le contexte actuel est donc très favorable aux scieurs nord-américains. La pandémie a provoqué une surchauffe de la demande pour le bois d’œuvre, alors que la capacité de production est insuffisante à court terme. Le débalancement de l’offre et de la demande a créé des conditions de rareté, ce qui s’est traduit par une rentabilité record des activités de sciage.

À preuve, le prix du contrat à terme sur le bois d’œuvre résineux se situe toujours au delà de la barre des 1 000 $ CA/MPMP. Sur une année complète, le prix du bois d’œuvre a atteint en moyenne 747 $ CA/MPMP en 2020, en progression de 58 % par rapport à l’année précédente.

La conjonction de ces éléments amène la plupart des PDG de l’industrie à afficher un optimisme marqué quant aux perspectives du bois d’œuvre. À ce stade-ci, les scieurs font leur possible pour maximiser leur production afin de tirer profit des prix record. Avec un bénéfice d’exploitation moyen de 300 $ CA/MPMP pour les scieurs de résineux dans l’est du Canada au troisième trimestre et un prix de vente légèrement inférieur au quatrième trimestre, les opérations de sciage pourraient difficilement être plus rentables.

Prix de vente, coût et résultat d’exploitation des scieries de l’est du Canada inscrites en bourse
($ CA/MPMP)

La situation devrait demeurer largement favorable en 2021, alors que le prix moyen du bois d’œuvre devrait se maintenir à environ 690 $ CA/MPMP, bien au delà de sa moyenne historique qui oscille aux alentours de 570 $ CA/MPMP depuis 1996. La baisse de prix du bois d’œuvre d’une année à l’autre sera compensée par la diminution récente des tarifs douaniers de 20 % à 9,0. Étant donné que la moitié du bois d’œuvre produit au Québec est exporté vers les États-Unis, cela diminuera les coûts à l’exportation pour les scieries réalisant des affaires au sud de la frontière. Une fois les tarifs soustraits, les revenus dégagés par les scieries exportatrices en 2021 devraient être plus importants que ceux de 2020. Rappelons que la dernière année fut faste pour les scieurs alors qu’ils ont généré des marges bénéficiaires record.

Impact des tarifs douaniers sur le prix du bois d'oeuvre
(en $ CA/MPMP)