Diminution globale de l’intensité de l’épidémie de tordeuse en 2022
En 2022, l’épidémie de la tordeuse des bourgeons de l’épinette (tordeuse) a évolué de façon asymétrique d’une région à l’autre, mais dans l’ensemble, son intensité s’est amenuisée en forêt privée.
Néanmoins, l’inventaire aérien effectué par le ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) démontre toujours une grande présence de l’insecte dans les boisés privés du Québec. Les superficies ont régressé d’environ 346 000 ha d’une année à l’autre pour atteindre 938 000 ha. Il faut toutefois mentionner que ces résultats sont présentés à l’échelle du paysage. Si on considère uniquement les peuplements vulnérables à la tordeuse, les superficies infestées s’avèrent beaucoup moins élevées.
Faits saillants de l’évolution de l’épidémie en forêt privée
Forêts privées du Québec : l’insecte est présent sur une superficie équivalente à 13 % de toutes les forêts privées du Québec. On estime à 21 000 le nombre de propriétaires de boisés affectés par l’épidémie. La superficie affectée par l’épidémie a diminué de 27 % cette année.
Abitibi-Témiscamingue : la superficie touchée a connu une recrudescence avec 16 % de superficies supplémentaires affectées, et ce, surtout au nord-ouest de l’Abitibi. L’épidémie est toutefois présente dans l’ensemble de la région.
Bas-Saint-Laurent : la situation s’est grandement améliorée puisque les superficies affectées ont diminué de 39 % et la sévérité de la défoliation est presque totalement légère. Il s’agit néanmoins de la région comportant la plus grande superficie de forêts privées infestées.
Capitale-Nationale : la superficie couverte par l’épidémie a plus que doublé comparativement à 2021. À cela s’ajoute une sévérité de défoliation accrue dans la MRC Charlevoix-Est où se concentre l’infestation depuis quelques années.
Chaudière-Appalaches : l’infestation continue de progresser dans la MRC L’Islet. Un peu plus de 17 000 ha sont désormais affectés par une défoliation légère à modérée.
Côte-Nord : seuls 15 218 ha de forêts privées sont infestés par la tordeuse cette année, ce qui représente une diminution drastique de 89 % des superficies touchées. L’épidémie est concentrée dans le secteur situé entre Tadoussac et Forestville.
Gaspésie : les superficies affectées ont diminué de 19 %, principalement aux environs de Sainte-Anne-des-Monts. Par contre, les secteurs touchés par une défoliation grave ou modérée ont augmenté cette année. Qui plus est, près des deux tiers des forêts privées de la région sont touchés.
Laurentides : l’infestation est toujours limitée à un seul foyer épidémique dans la région de Sainte-Adèle. Ce foyer de 15 ha de forêts privées présente une défoliation légère.
Mauricie : aucun signe d’épidémie n’a été détecté en 2022.
Outaouais : l’infestation se poursuit au nord de Maniwaki. La région compte désormais 224 ha de forêts privées affectés.
Saguenay-Lac-Saint-Jean : les aires défoliées en 2021 ont augmenté de 30 700 ha, soit une progression de 29 %. Près d’un tiers des forêts privées de la région est infesté par une défoliation majoritairement légère.
Bilan du programme de protection des investissements sylvicoles en petites forêts privées
Les boisés privés de moins de 800 ha d’un seul tenant peuvent bénéficier d’un programme de protection par arrosage d’insecticide biologique Btk. Cet outil de contrôle des dommages de l’insecte se limite aux peuplements forestiers vulnérables ayant bénéficié d’investissements sylvicoles comme des plantations, des éclaircies précommerciales et commerciales. La mise en œuvre du programme est confiée à la Société de protection des forêts contre les insectes et maladies (SOPFIM) qui travaille en collaboration avec les intervenants en forêt privée.
Pour une cinquième année consécutive, des opérations de protection des petites forêts privées ont eu lieu. La superficie totale traitée par arrosage en 2022 s’est élevée à 13 459 hectares. Il s’agit d’une baisse de 40 % par rapport à 2021 en raison de la diminution de l’intensité de l’épidémie au Bas-Saint-Laurent. Au total, 849 propriétaires forestiers ont pu bénéficier des arrosages réalisés par la SOPFIM afin de protéger leurs investissements sylvicoles. Les propriétaires forestiers inquiets pour leurs investissements sylvicoles peuvent consulter le site Web de la FPFQ pour obtenir davantage d’informations.
Un outil pour vérifier la vulnérabilité de votre boisé
Il est possible de se préparer à la venue de l’épidémie de tordeuse grâce à cette carte interactive. Visualisez sa progression et vérifiez si un peuplement forestier vulnérable est présent sur votre boisé simplement en entrant l’adresse municipale de votre lot. La vulnérabilité se définit par la probabilité que les arbres meurent après plusieurs années de défoliation grave. Les essences les plus à risque de mortalité sont principalement le sapin baumier, l’épinette blanche et l’épinette de Norvège. Quoique plus résilientes que les précédentes, l’épinette rouge et l’épinette noire sont également vulnérables.
Le risque de mortalité augmente pour les arbres matures possédant peu de feuillage. Les peuplements denses établis sur des sites peu productifs, par exemple sur des sols trop humides ou trop secs, sont plus à risque d’être affectés gravement par la tordeuse. Ainsi, le risque de mortalité dans une sapinière mature, dense et établie sur un site humide sera très élevé à la suite des attaques répétées de l’insecte. Par ailleurs, les propriétaires de boisés devraient garder un œil sur leurs peuplements composés de sapins matures dans les régions infestées ou à proximité. Rappelons qu’il faut plusieurs années consécutives de défoliation graves pour causer la mortalité d’arbres.
Préparation à l’épidémie
Afin de minimiser les pertes en volume, les propriétaires forestiers sont encouragés à récolter de façon préventive les peuplements forestiers vulnérables. Ils sont également incités à récupérer rapidement le bois des peuplements fortement affectés. Heureusement cette année, la bonne tenue du marché du bois d’œuvre résineux a permis d’écouler ces volumes récupérés par les producteurs forestiers. Néanmoins, avant d’entreprendre une récolte, les producteurs forestiers devraient s’informer des possibles débouchés sur les marchés auprès de leurs syndicats et offices de producteurs de bois. Il est également impératif qu’ils se préoccupent au préalable de rétablir une régénération naturelle adéquate ou de s’assurer de la disponibilité de plants forestiers pour le reboisement.
Les prochaines étapes
La FPFQ poursuit son travail en collaboration avec Groupements forestiers Québec, le MRNF et la SOPFIM afin d’atténuer l’impact de l’épidémie de la tordeuse sur les forêts privées. Les travaux devront se poursuivre afin d’adresser les enjeux que vivent les producteurs forestiers des régions affectées comme :
- assurer une meilleure coordination des volumes de bois provenant des forêts publiques et privées affectées par la tordeuse. L’écoulement du bois des forêts privées sur les marchés est particulièrement préoccupant dans l’est du Québec.
- augmenter les budgets et la disponibilité des plants forestiers. À l’échelle du Québec, les intervenants régionaux ont estimé avoir besoin annuellement d’un budget supplémentaire de 6,8 M$ en aménagement forestier et de 3 millions de plants. Le manque de ressources actuel est inquiétant pour l’avenir du potentiel forestier. Les plantations en forêt privée ont pourtant démontré d’excellents résultats de productivité étant donné l’implication des propriétaires et des conseillers forestiers.
- renouveler le Programme de protection contre la tordeuse des bourgeons de l’épinette pour la petite forêt privée qui permet une application d’insecticide biologique pour protéger les investissements sylvicoles passés qui n’ont pas atteint leur maturité. Le programme vient à échéance le 31 mars 2023 et il doit être renouvelé afin de poursuivre les traitements .
- réviser les critères d’admissibilité des peuplements au programme de protection pour qu’une région touchée puisse en bénéficier, indépendamment de l’admissibilité en forêt publique. Actuellement, 28 % des forêts privées de l’Abitibi sont infestées par la tordeuse, mais le programme de protection ne peut être déclenché puisque les forêts publiques de cette région ne remplissent pas encore les critères d’admissibilité.
- poursuivre la diffusion d’informations et l’analyse des besoins régionaux, notamment de l’Abitibi, des Appalaches et de la Capitale-Nationale qui sont maintenant malheureusement atteintes par l’épidémie.