Les espèces exotiques envahissantes qui menacent nos forêts

Les espèces exotiques envahissantes constituent une menace pour les forêts. Il est donc essentiel de savoir les identifier et de protéger nos forêts contre ces ravageurs par des mesures de prévention, de détection précoce, d’éradication et de contrôle. Même si vos arbres sont affectés, il est souvent possible d’en récupérer une partie pour les valoriser. Il ne faut toutefois pas trop tarder pour les récolter.

Les changements climatiques et les catastrophes naturelles qui en découlent ne sont pas les seuls à mettre en péril nos forêts. Depuis 1882, plus de 80 espèces exotiques envahissantes (EEE) ont été introduites au Canada, dont plusieurs se sont révélées extrêmement dommageables pour les forêts canadiennes1. L’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) a d’ailleurs récemment confirmé la première détection du flétrissement du chêne en Ontario.

Qui sont-elles et comment agir?

Une espèce exotique envahissante est un végétal, un animal ou un microorganisme (virus, bactérie ou champignon) qui est introduit hors de son aire de répartition naturelle, qui colonise de nouveaux sites ou de nouvelles régions à un rythme rapide et qui peut former des populations dominantes. Son établissement et sa propagation peuvent constituer une menace pour l’environnement, l’économie ou la société2. Les propriétaires forestiers peuvent se sentir démunis face à ces fléaux. Il est toutefois possible d’appliquer différentes stratégies de gestion en fonction de la phase d’invasion où se trouve l’EEE.

Phases d’une invasion et éléments stratégiques de gestion correspondant3

Prévention, détection et signalement
De façon générale, la meilleure façon de protéger notre forêt est de s’assurer qu’elle soit en santé. Les insectes et maladies s’attaquent prioritairement aux individus plus faibles et moins vigoureux. Un aménagement forestier qui favorise les arbres sains, une diversité d’essences et surtout des espèces adaptées à leur milieu écologique augmentera le niveau de résistance et la résilience de la forêt en cas d’attaque. De plus, les déplacements de bois, surtout de bois de chauffage, permettent aux insectes de voyager rapidement. Il est donc recommandé d’acheter le bois de chauffage localement afin de réduire les risques.

Lorsque des EEE réussissent à pénétrer au Canada, il est essentiel de pouvoir les détecter et les identifier avant qu’elles ne s’établissent ou ne se répandent. Encore faut-il savoir les reconnaître. Le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) a mis au point l’outil de détection Sentinelle. Cette plateforme regroupe des informations sur les principales EEE du Québec et sur la manière de les reconnaître. Elle permet également de transmettre des observations d’EEE et de consulter celles transmises par les utilisateurs. De plus, chaque année au mois d’août, l’ACIA fait appel à la population canadienne pour inspecter les arbres à la recherche d’organismes nuisibles durant le Mois de l’inspection des arbres4.

Éradication et contrôle
Les EEE qui s’établissent au Canada doivent être gérées au moyen de mesures d’éradication, de confinement et de contrôle visant à les empêcher de se répandre. Il est parfois possible de les éradiquer si certaines conditions sont réunies : une détection rapide, un programme doté de ressources financières suffisantes, une espèce sensible aux moyens de lutte, des mesures de prévention d’une réinfestation et la restauration du milieu affecté au besoin. Le longicorne asiatique est un bon exemple d’un ravageur qui se prête bien à l’éradication. En effet, il est possible de détecter une petite infestation introduite récemment, les moyens utilisés (abattage systématique des arbres hôtes dans la zone réglementée et leur mise en copeaux) sont efficaces, on peut prévenir la réinfestation en contrôlant le transport du matériel infesté dans la zone réglementée, et des budgets adéquats ont été accordés.

En plus de l’éradication, il existe d’autres stratégies de contrôle des EEE. On peut réduire la densité d’un ravageur exotique dans l’aire infestée, en ralentir la progression ou utiliser des outils de contrôle biologique classique. D’ailleurs, les organismes privés ou publics peuvent appliquer au Programme pour la lutte contre les plantes exotiques envahissantes. Ce programme, géré par la Fondation de la faune du Québec et financé par le gouvernement du Québec, offre une aide financière aux initiatives visant les travaux de lutte contre les plantes exotiques envahissantes et la restauration des habitats dans un site à haute valeur écologique ou à proximité.

Quoi faire du bois?

Une partie des arbres affectés par des EEE peut être utilisée et transformée en produits du bois, ce qui permet de récupérer certains arbres qui, autrement, se dégraderaient sur place. Il faut cependant éviter de déplacer le bois infesté et de l’utiliser comme bois de chauffage. Contrairement aux cas de feux de forêt où la récupération des arbres brûlés doit se faire dans un délai très court, lors d’épidémies d’insectes ou de maladies, la détérioration des arbres se déroule généralement sur une période de deux à trois ans5. Chaque année, le ministère des Ressources naturelles et des Forêts effectue un relevé aérien des dommages causés par divers insectes dans les forêts du Québec. Les résultats de ce relevé annuel sont accessibles à tous et concernent des insectes indigènes en Amérique du Nord, soit l’arpenteuse de la pruche, la livrée des forêts, la tordeuse des bourgeons de l’épinette et la tordeuse du pin gris.

À retenir

  • Restez informé des EEE présentes dans votre région, des conséquences potentielles sur votre forêt et des mesures à prendre.
  • Privilégiez la présence d’une certaine diversité d’arbres dans les peuplements lors des traitements sylvicoles afin de favoriser la résilience du peuplement forestier.
  • Visitez régulièrement votre propriété pour détecter rapidement les situations anormales.
  • Consultez votre conseiller forestier qui pourra vous fournir les informations précises sur un problème spécifique à votre boisé et proposer les solutions adéquates pour y remédier.

Principales EEE forestières par ordre chronologique d’apparition

1 Ressources naturelles Canada (RNCan). 2015. Les espèces exotiques envahissantes forestières, Espèces établies. https://www.ravageursexotiques.gc.ca/especes-e
2 MELCCFP. 2023. Espèces exotiques envahissantes. https://www.environnement.gouv.qc.ca/biodiversite/especes-exotiques-envahissantes/index.asp
3 RNCan. 2008. Étude des menaces et des risques liés aux espèces exotiques envahissantes forestières. https://scf.rncan.gc.ca/publications?id=32570
4 Agence canadienne d’inspection des aliments. 2023. Arrêter la propagation et garder les espèces envahissantes hors du Canada. https://inspection.canada.ca/protection-des-vegetaux/especes-envahissantes/arreter-la-propagation/fra/1655945133110/1655945931559
5 Ministère des Ressources naturelles et des Forêts. 2023. Peut-on récupérer le bois affecté par des perturbations naturelles? https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/peut-on-recuperer-bois-affecte-perturbations-naturelles