Utilisation de la possibilité de récolte en forêt privée et opportunités
Le respect de la possibilité de récolte forestière est au cœur des préoccupations des ingénieurs forestiers, tant sur le territoire public que privé. Maintenir un niveau de récolte en dessous de la croissance des forêts sur un territoire, tout en s’assurant que cette récolte permette de préserver des peuplements forestiers dans toutes les strates d’âge favorise une foresterie durable. L’utilisation de la possibilité de récolte forestière à son plein potentiel optimise les retombées associées à la transformation des bois à long terme. Évidemment, les épidémies d’insectes et les feux de forêt sont des catastrophes naturelles venant quelques fois bouleverser ces calculs.
La possibilité de récolte forestière est définie comme étant « le volume de bois qu’il est permis de prélever chaque année dans une zone donnée. Celle-ci permet de réglementer le niveau de récolte pour garantir un approvisionnement durable en bois » (OIFQ, Dictionnaire de la foresterie).
Le suivi annuel de la récolte forestière est réalisé par les syndicats et offices régionaux de producteurs forestiers qui travaillent à la commercialisation des bois provenant de la forêt privée. Des mécanismes peuvent être mis en place au niveau régional pour orienter les récoltes et l’aménagement forestier afin de permettre d’assurer le respect de la possibilité forestière. Pour ce faire, plusieurs facteurs doivent être évalués, comme les volumes de bois non récoltés dans les années précédentes, la vulnérabilité de la forêt aux perturbations naturelles et les fluctuations dans la demande industrielle pour les bois des forêts privées. Périodiquement, un travail pour réviser les calculs de la possibilité forestière régionale est réalisé pour le compte des agences régionales de mise en valeur des forêts privées. Ces calculs s’appuient sur les plus récentes données des inventaires forestiers produits par le MFFP. Pour en savoir davantage sur les calculs de possibilité de récolte forestière en forêt privée, consultez l’édition du mois d’août 2014 du Forêts de chez nous PLUS.
Utilisation de la possibilité de récolte en forêt privée
Actuellement, la possibilité forestière sur le territoire privé québécois est évaluée à 17 Mm³ solides bruts de bois rond par année et est répartie également entre les essences résineuses et feuillues. Plus précisément, 34 % de cette possibilité est composée des essences du groupe sapin, épinettes et pin gris (SEP), 13 % du groupe mélèze, pins, pruche et thuya, 17 % du groupe des peupliers et 37 % du groupe des feuillus durs.
Il est courant d’entendre que la récolte de bois ne dépasse pas la moitié de la possibilité de récolte en forêt privée. Si cette affirmation est juste à l’échelle provinciale, il est nécessaire d’effectuer une analyse plus fine de la situation, à l’échelle régionale, selon les groupes d’essences composant ces territoires.
Ainsi, la récolte de bois à destination des usines de transformation fut de 6,4 Mm³ et la récolte de bois de chauffage fut d’environ 1,8 Mm3 en 2018, pour une récolte totale de 8,2 Mm³ et une utilisation de 48 % de la possibilité de récolte forestière.
Toutefois, le tableau suivant démontre que cette récolte n’est pas également répartie entre les groupes d’essences.
À partir des statistiques de mise en marché compilées par la Fédération des producteurs forestiers du Québec et ses affiliés, on constate une surpondération de la récolte dans le groupe SEP par rapport aux autres groupes d’essences. Près de 75 % de la possibilité de récolte du groupe SEP fut ainsi récolté en 2018, en raison des bonnes conditions de marché pour le bois de qualité sciage des dernières années. La présence de marchés pour les petites billes résineuses aurait permis d’accroître la récolte dans ce groupe d’essence. À l’inverse, seulement 20 % de la possibilité de récolte forestière a été utilisé dans le groupe mélèze, pins, pruche et thuya. La dynamique des peupliers et des feuillus durs est semblable avec un taux de récolte avoisinant 40 % dans chacun des groupes.
Particularités par territoire d’agence de mise en valeur des forêts privées
Malgré le fait que le taux de récolte provincial soit près de 75 % pour le SEP, le portrait est fort variable d’une région à l’autre. C’est le cas des régions du Témiscamingue et des Appalaches où la récolte a excédé la possibilité forestière de 16 % et de 41 % respectivement en 2018. À l’opposé, les régions de la Mauricie, des Laurentides, de l’Outaouais, de la Côte-Nord, de Lanaudière et de la Montérégie ont toutes des taux de récolte inférieurs à 50 % de la possibilité forestière pour ce groupe d’essences.
Le groupe des mélèze, pins, pruche et thuya demeure sous-utilisé dans toutes les régions. Les territoires du Centre-du-Québec, de la Capitale-Nationale, des Appalaches et de Chaudière parviennent à exploiter entre 38 et 52 % de la possibilité forestière dans ce groupe d’essences. Malgré le fait qu’il y ait d’importants volumes disponibles dans les régions du Bas-Saint-Laurent, l’Outaouais et la Montérégie, les taux de récolte sont tous en bas de 20 % par rapport à la possibilité forestière régionale.
Le potentiel inexploité du groupe des peupliers demeure important dans la majorité des régions. Bien que le taux de récolte soit élevé dans les régions du Témiscamingue et de Chaudière, la majeure partie des autres territoires a un taux de récolte de moins de 30 % dans cette essence.
Enfin, environ 70 % de la récolte du groupe d’essences des feuillus durs est destiné au bois de chauffage. En raison de cette utilisation, la moyenne provinciale du taux de récolte dans ce type d’essences s’élève à environ 40 % de la possibilité forestière.
Potentiel inexploité
L’importance grandissante du bois de sciage dans la mise en marché de la forêt privée explique que le groupe SEP est surpondéré en récolte comparativement aux autres types d’essence. Pourtant, ce type d’essence ne représente que 34 % de la possibilité forestière sur la forêt privée. De plus, la composition en essence des forêts de chacune des régions est très variable. C’est pourquoi il est essentiel de trouver des débouchés rentables dans les autres types d’essence afin de permettre d’équilibrer la récolte et la croissance du patrimoine forestier en forêt privée.
Le volume de bois récolté varie selon les régions et reflète la demande industrielle pour les produits du bois. Cette analyse permet d’identifier les régions et les types d’essence qui sont les plus susceptibles d’accueillir de nouvelles filières de transformation. Le développement de celles-ci augmenterait les retombées économiques de l’industrie forestière pour le Québec.
Les graphiques suivants présentent la proportion de la possibilité forestière récoltée en forêt privée par territoire d’agence et groupes d’essences.