Le 25 juillet dernier, Affaires mondiales Canada a confirmé les résultats du sixième examen administratif des droits antidumping sur le bois d’œuvre résineux canadien exporté aux États-Unis. La nouvelle est alarmante : le Département du Commerce des États-Unis a imposé une hausse des droits antidumping, passant de 7,66 % à 20,56 % à compter du 30 juillet.

Ces droits antidumping s’additionnent aux droits compensateurs de 6,74 % actuellement en vigueur pour porter le total des droits combinés (antidumping et compensateurs) à un niveau historique de 27,30 %, contre 14,54 % auparavant.

En plus, ces nouveaux droits antidumping s’appliqueront rétroactivement pour 2023, et resteront en vigueur jusqu’à la publication des résultats du septième examen. Il s’agit d’un double coup de massue, alors que nous estimons que le coût de cette rétroaction pourrait atteindre 944 M$ pour l’industrie forestière canadienne et 195 M$ uniquement pour celle du Québec.

Une flambée des droits compensateurs et antidumping

Cette forte augmentation des taxes sur le bois d’œuvre résineux canadien exporté aux États-Unis marque le plus haut droit combiné jamais enregistré depuis le début de ce conflit en 2016. À eux seuls, les droits antidumping surpassent les droits combinés des dernières années. Ce niveau de taxation sans précédent représente un véritable test de résilience pour l’ensemble du secteur forestier canadien.

Et comme si cela ne suffisait pas, le Département du Commerce des États-Unis publiera également sous peu les résultats définitifs des examens compensateurs. Par conséquent, d’ici la date limite du 8 août 2025, le niveau des droits compensateurs pourrait également augmenter et s’ajouter à cette charge, ce qui aurait un impact supplémentaire sur l’industrie forestière canadienne.

Depuis le début des années 1980, la dispute sur le bois d’œuvre a engendré cinq litiges majeurs et trois accords bilatéraux. Tout au long de ce conflit historique, le gouvernement américain a constamment tenté de restreindre l’accès du bois canadien à son marché en ayant recours à des quotas ou à des tarifs douaniers. Actuellement, les droits appliqués figurent parmi les plus élevés jamais enregistrés depuis le début de ce long bras de fer commercial, n’étant surpassés que lors d’une brève période en 2001-2002. La révision prochaine des droits compensateurs se traduira-t-elle par un triste record de tarifs pour les scieurs canadiens?

Le conflit autour du bois d’œuvre entre le Canada et les États-Unis continue de peser lourdement sur l’industrie forestière canadienne. Une fois de plus, le protectionnisme américain se manifeste par des mesures commerciales injustifiées et punitives. Ces actions unilatérales ne font qu’éroder la compétitivité du bois d’œuvre canadien sur son principal marché d’exportation, les États-Unis, et portent directement préjudice à l’ensemble du secteur forestier. À titre indicatif, environ 38 % de la production totale de bois d’œuvre résineux du Québec est exportée aux États-Unis et se trouve assujettie à ces taxes.

Dernièrement, plusieurs scieries ont dû annoncer des fermetures ou des ralentissements de production. Parmi les entreprises majeures touchées, le groupe Arbec a fermé plusieurs usines, notamment à Port-Cartier, à Saint-Roch-de-Mékinac, à Parent et à L’Ascension-de-Notre-Seigneur. Une reprise graduelle est attendue ici et là. Plus tôt dans l’année, Damabois avait également fermé ses portes pour une durée indéterminée à Saint-Jean-Port-Joli et à Cap-Chat. De son côté, Scierie St-Michel a annoncé tout récemment la fermeture de ses installations, ajoutant à la liste des scieries en difficulté.

Ces décisions ont des conséquences dramatiques pour les communautés locales, pour l’économie régionale et, par ricochet, pour les producteurs forestiers qui dépendent de cette industrie. En 2024, le bois de sciage de sapin-épinette représentait 63 % des volumes mis en marché en forêt privée, générant une valeur de près de 300 millions de dollars. Le contexte géopolitique aura encore une fois une incidence prépondérante sur la capacité des producteurs à mettre en marché du bois.

Le 5 août, le premier ministre Mark Carney a proposé une série de mesures pour soutenir l’utilisation du bois canadien par la diversification des marchés et par le développement de la construction. Il a également offert un soutien financier aux entreprises du secteur et des formations aux travailleurs. Même si ces mesures doivent être accueillies favorablement, aucune n’aide directement les producteurs.

L’avenir du secteur dépend en grande partie d’une résolution rapide du litige sur le bois d’œuvre. Espérons que les gouvernements canadien et américain négocieront bientôt une solution pour mettre fin à cette situation, une solution qui mettra enfin à l’abri les producteurs forestiers d’un litige où ils ne sont que des victimes collatérales.