Certains débroussailleurs couvrent une superficie pratiquement deux fois plus grande que d’autres en une journée. C’est une question d’équipement et de techniques de travail. Deux experts dispensent des conseils quant au choix d’une débroussailleuse.

Le dégagement de plantations avec un couteau à taillis nécessite une débroussailleuse d'une puissance variant entre 35 et 45 cc. Un modèle léger doté de poignées ergonomiques facilitera les mouvements. Crédit photo : Martin Ménard

Votre magazine Forêts de chez nous a interrogé deux débroussailleurs de métier qui sont également formateurs en débroussaillage pour la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

Dans le cadre de leurs activités de formation, ils ont l’opportunité d’essayer les derniers modèles de débroussailleuses offerts sur le marché. Paul Cyr, qui habite New Richmond en Gaspésie, recommande d’opter pour un modèle de qualité professionnelle. « La machine est plus fiable, ce qui engendre moins de perte de temps en réparations. Et les modèles professionnels ont une meilleure conception ergonomique, ce qui diminue la fatigue du travailleur », note M. Cyr. De plus, il conseille de ne pas s’entêter à conserver la même machine durant des années. « Les nouveaux modèles ont des système antivibrations plus développés, des harnais nettement améliorés et le poids est souvent réduit. La fiabilité d’une machine neuve accroît significativement le rendement du travailleur », affirme-t-il.

Au chapitre des marques, Stihl, Jonsered et Husqvarna offrent des produits dont la qualité et les performances se comparent. « À mon avis, ce qui devrait véritablement influencer le choix d’une marque de débroussailleuse, c’est le service : un détaillant qui s’y connaît et qui peut réparer rapidement une machine, ça fait toute la différence », estime le formateur.

Lors des travaux d'éclaircie précommerciale, il importe d'utiliser une débroussailleuse assez puissante (plus de 45 cc), dont la longueur du tube dépasse celle des pieds afin d'avoir plus d'options d'abattage. Crédit photo : Martin Ménard

Quelle débroussailleuse choisir?

Pour le travail d’éclaircie précommerciale d’une forêt qui comporte des tiges de ¼ po à 2½ po de diamètre, M. Cyr recommande une débroussailleuse de 50 cc munie d’un pied réducteur de 24 ou 25 degrés et de poignées droites (standards). Ce type d’appareil permet de déterminer l’angle de coupe simplement en levant les poignées vers la droite ou la gauche. L’expérience de M. Cyr en forêt et de plusieurs travailleurs qu’il côtoie l’incite à dire que la lame Oregon à 24 dents demeure la plus populaire, en raison de sa fiabilité et du fait qu’elle garde son tranchant plus longtemps. 

Lorsqu’on doit couper des tiges de 3 ou 4 po de diamètre, M. Cyr recommande un modèle de 57 cc. À l’inverse, si les arbres sont de faible diamètre ou si l’opérateur est de petite stature, un modèle professionnel moins puissant, mais plus léger, sera avantageux.

Dans le cas d’un dégagement de plantation à l’aide d’un couteau à taillis, l’emploi d’un pied réducteur de 35 degrés et d’un capot protecteur approprié est recommandé. De cette façon, les débris de coupe sont projetés vers le sol plutôt que vers le visage de l’opérateur. « Optons aussi pour des poignées ergonomiques, c’est-à-dire courbées [et non standards], qui permettent d’aller en chercher plus grand lors des mouvements gauche-droite, sans torsions supplémentaires du dos », explique M. Cyr. Lors du dégagement de plantations, il suggère aussi de porter des lunettes de sécurité en plus de la visière, « car avec toutes ces projections, certains travailleurs ont malheureusement subi des accidents aux yeux », relate-t-il.

Stratégie

Au bénéfice des travailleurs, Paul Cyr prêche pour sa paroisse en soulignant que les techniques enseignées lors des formations aident réellement les débroussailleurs à augmenter leur productivité tout en réduisant les efforts déployés. « Certains travailleurs, par méconnaissance, font des mouvement inutiles. D’autres ajustent mal les sangles de leur harnais, ce qui répartit le poids de la débroussailleuse inégalement sur les points d’appui. Voilà entre autres ce que nous pouvons corriger grâce aux formations », dit M. Cyr.

Pour diminuer la fatigue et accroître les performances, il faut adopter une bonne stratégie de coupe. La planification du travail s’effectue en fonction du vent, de la pente du terrain, de la présence de cours d’eau, de la densité des peuplements, des points de ravitaillement, etc. « Quand un gars tourne en rond ou qu’il marche inutilement, ça coûte de l’argent », résume le formateur qui recommande aussi aux travailleurs de garder autant leur débroussailleuse que leur état de santé dans la meilleure condition possible.

« Pour maintenir un bon rythme et un niveau d’énergie adéquat, un débroussailleur doit boire de l’eau aux demi-heures, manger des collations et éviter les coups de chaleur », ajoute M. Cyr.

Conseils d’un deuxième expert

Renaud Longrée, qui habite la région de Mont-Laurier, connaît très bien le métier de débroussailleur. D’entrée de jeu, il suggère minimalement un moteur de 45 cc pour les débroussailleuses employées par des forestiers professionnels.

Le formateur Renaud Longrée (à gauche) précise qu'une bonne technique de débroussaillage accroît les performances du travailleur et améliore sa sécurité. Crédit photo : Renaud Longrée

« Une machine de 60 cc se révélera cependant trop lourde lorsque les tiges font moins de 3 po de diamètre ou pour les travaux de dégagement de plantations avec un couteau à taillis », précise-t-il.

Il affirme que la longueur du mat est un aspect souvent négligé en coupe d’éclaircie précommerciale. « Lorsque l’utilisateur peut toucher au garde avec son pied, c’est que le mat est trop court. Et ça accroît les risques de blessures : si l’utilisateur glisse, son pied peut heurter la lame. Le travailleur perd aussi des options d’abattage [pour diriger la chute des tiges] si le mat est trop court », relève-t-il. Lors du dégagement de plantations, un tube plus long permet également de faire de plus grands mouvements gauche-droite.

Bref, au moment d’acheter une débroussailleuse, les gens de plus grande taille doivent envisager la possibilité de commander un tube plus long.

Un mot sur les différentes marques

Renaud Longrée soutient lui aussi que Jonsered, Husqvarna et Stihl offrent toutes des débroussailleuses de bonne qualité, mais au fil des journées passées en forêt, il a noté certaines différences entre les marques. « À mon sens, les Stihl ont des composantes plus solides et plus durables. Les vis, par exemple, ont tendance à se desserrer moins rapidement. Le moteur garde sa compression. Pour ce qui est de Jonsered et Husqvarna, l’ergonomie des débroussailleuses est supérieure; ce sont des scies extrêmement maniables qui permettent une plus grande fluidité des mouvements. Par exemple, le réservoir à essence est situé devant le moteur. Par conséquent, le niveau d’essence a moins d’emprise sur le centre de gravité », explique M. Longrée. 

Cependant, il met un bémol aux avantages des nouvelles technologies de carburateurs. Selon lui, les performances d’une machine sont bel et bien supérieures lorsque le contrôle électronique fonctionne bien, mais les défaillances font perdre du temps sur le terrain. « Quand le système électronique fait des siennes, l’utilisateur est incapable d’ajuster le carburateur lui-même, comme à l’époque. Il faut remplacer le module, ce qui n’est pas évident en forêt », donne-t-il en exemple.

Selon M. Longrée, le harnais joue un rôle de premier plan pour ce qui est des performances et de l’endurance du travailleur. Il estime que toutes les marques ont énormément amélioré leur conception, mais à son avis, la palme revient à Jonsered et à Husqvarna. « Les bretelles de leurs harnais sont reliées par un point pivot. Quand l’utilisateur se penche d’un côté, le poids est réparti sur les deux épaules et non seulement sur une seule. La plaque fémorale n’est pas attachée directement à la ceinture, mais plutôt à la plaque pectorale et dorsale, ce qui diminue les tensions au dos et améliore la liberté des mouvements », explique-t-il.

Husqvarna
Jonsered

Cinq trucs de sécurité

  1. Toujours tenir les poignées. Quand un travailleur tente d’attraper un arbre avec sa main parce qu’il a mal dirigé sa coupe, il lâche les poignées et se rend alors vulnérable. En effet, si, à ce moment, la tige tombe sur le moteur ou si la lame touche une autre tige, elle peut effectuer un rebond vers le haut et devenir dangereuse pour l’opérateur.
  2. Les deux pieds par terre. Avant d’amorcer la coupe, il est impératif d’être en équilibre, les deux pieds solidement ancrés dans le sol. Un travailleur qui désire aller trop vite et qui commence à couper une tige alors que son corps est en déséquilibre peut chuter ou subir des tensions aux genoux et au dos.
  3. Les rebonds. Il importe de respecter la zone de rebond de la lame et de ne pas utiliser la section si se situe entre midi et quatorze heures.
  4. Affûtage. Une lame bien affûtée accroît les performances, tout en se révélant moins exigeante pour la mécanique de la débroussailleuse et pour le travailleur. La lame forestière doit avoir minimalement 2 mm d’épaisseur. « Une lame trop mince qui casse et dont un fragment termine sa course dans le cou d’un autre travailleur, on a déjà vu ça », affirme l’un des formateurs. Un couteau à taillis doit aussi être suffisamment épais. On doit éviter d’acheter des lames bon marché qui ne respectent pas les normes et qui pourraient présenter des microfissures. Certains assurent que le couteau à taillis Stihl de 3,2 mm d’épaisseur est l’un des plus sécuritaires.
  5. Premiers soins. Il est recommandé de garder un tampon stérile sur soi. C’est un moyen rapide d’arrêter l’hémorragie avant de marcher jusqu’à la trousse de premiers soins.

Husqvarna

Les deux modèles Husqvarna les plus employés par les forestiers professionnels sont le 545 FX et le 555 FX. Le gérant de territoire pour le sud-ouest du Québec, Jean-François Trottier, recommande d’emblée la technologie X-Torq, qui accroît la puissance et réduit les émissions jusqu’à 75 %, « une nette avancée comparativement aux générations précédentes. De plus, on y retrouve trois composantes mobiles [vilebrequin, bielle et piston] au lieu de cinq, ce qui réduit la vibration et augmente la durabilité ». Les débroussailleuses Husqvarna sont munies d’un bouton arrêt qui revient automatiquement en position de départ lorsque la machine est arrêtée afin de faciliter le prochain démarrage. La manette des gaz se situe au niveau du pouce, ce qui, selon la compagnie, accroît la précision et réduit l’effort des muscles de la main. « Le harnais et les poignées ergonomiques facilitent les mouvements latéraux, répartissent mieux le poids de la scie et la gardent devant soi », ajoute M. Trottier. Finalement, un dispositif breveté de sécurité permet de libérer instantanément la machine du harnais en cas d’urgence.

                                                                                               

Husqvarna

Jonsered

Jonsered

 

La marque Jonsered appartient à Husqvarna, qui a elle-même été achetée par Electrolux en 1978. Sans surprise, les composantes principales des débroussailleuses Husqvarna se retrouvent dans les modèles Jonsered : moteur, manette des gaz actionnée par le pouce, poignées capitonnées pour un confort accro, etc. Deux modèles retiennent l’attention des forestiers professionnels : le FC 2245 et le FC 2256, respectivement de 46 et de 53 cc. Le directeur de la marque Jonsered pour l’est du Canada, Stephen Clark, souligne l’excellente dispersion de la chaleur du moteur, qui permet une plus grande longévité de la machine et un accès facile à la bougie d’allumage et au filtreur à air. À son avis, le harnais de cet appareil est le meilleur sur le marché. « C’est vraiment un harnais ergonomique qui transfère le poids de la machine de façon optimale sur le corps du travailleur. Il comprend une poche pour des outils et un téléphone, des bandes réfléchissantes, etc. Il y a plusieurs caractéristiques qui augmentent le confort et facilitent les mouvements. »

Stihl

« Le modèle forestier le plus commun est le FS 460, de 46 cc. Il coupe facilement des tiges de 2 ou 3 po de diamètre. Pour celles qui sont de plus gros calibre, nous avons une débroussailleuse de 57 cc qui est aussi résistante qu’un tank, mais comme les autres modèles de cette cylindrée, elle est très lourde; il faut des genoux costauds pour travailler avec ça 40 heures par semaine », conseille Yann Allard, gérant des services techniques et de la formation chez Stihl. M. Allard soutient qu’avec une bonne technique, le modèle de 46 cc peut réaliser tous les travaux professionnels, que ce soit l’éclaircie précommerciale ou le dégagement de plantations. Le pied de cette débroussailleuse, dont l’angle est de 25 degrés, sert aux travaux d’éclaircie avec une lame ronde. Pour le dégagement de plantations avec un couteau à taillis, l’utilisateur peut acquérir, en option, un pied incliné à 35 degrés.

« Si une personne effectue principalement du dégagement de plantations, je lui recommande le FS 360, doté de poignées courbées qui ne se cogneront pas sur sa cuisse lors des mouvements gauche-droite. C’est aussi une machine destinées aux propriétaires de boisés qui veulent un modèle à tout faire, robuste, mais léger », mentionne M. Allard.

Stihl met en vedette son système antivibrations qui isole les poignées, à la fois du moteur et de l’outil de coupe. De plus, sa technologie M-Tronis ajuste automatiquement le mélange carburé pour une performance optimale dans toutes les conditions. La compagnie affirme avoir réalisé une vraie percée avec son démarrage Easy2Start, où il suffit de tirer la corde au tiers de la force normale… avec deux doigts! »

Crédit photo : Rainer Herzog
Stihl

Article paru dans la revue Forêts de chez nous de mai 2016.